Au cimetière, les morts ne pensent plus.
Leurs restes se mélangent à la terre face au soleil qui se lève sur d'anciennes montagnes.
Les portes de l'église se ferment aux passants mettant en sourdine les voix qui auraient aimé s'élever vers les hauteurs de la nef.
970 ans de présence s'accumulent en pierres.
Les jeunes grimpent la colline pour quelques baisers et caresses sages puis s 'en vont.
Un homme au pas lourd et tanguant vient avec un bidon d'eau à bout de bras abreuver les plantes en pots d'une tombe et s'en retourne appuyé sur sa canne torsadée.
Seule
la love mobile
reste
toute la nuit.
Elle aussi va tanguer
d' une autre danse qu' on ne nommera pas, dont on ne connaįt pas le nombre de temps.
Les mains massent la peau huilée
découvrent la chair où la vie circule dessous dans ses méandres de veines charriant l'eau et le sang.
Entre chaque position les bouches s'emmêlent.
Ouverture des gestes qui déploient l'énergie créatrice de désir et de tendresse.
Explorent l'intimité de l'un, de l'autre tout en délicatesse.
Le parfum de la rose enivre. Celui des sexes circule dans l'habitacle. La sueur s'en mêle.
Les soupirs sont à peine perceptibles.
Ils sont doux.
La lune s'est levée avec une étoile à ses côtés, comme un clin d'œil.
On n'est vraiment pas d'accord sur la position du sud et les corps changent de positions N-S, S-N.
Ils écartent leurs cuisses translucides et s' inventent des tours et des palais de milles et une nuits douces et alunées dans la Peugeot en apnée.
Rien de pénétrant.
Rien qui fouille.
On reste à la surface des peaux. On teste la sensibilité de l'autre et quand cet autre frissonne on note ce point de tressaillement pour y revenir un autre jour, sans brûler les étapes.
Les morts ne pensent plus
mais les vivants trouvent des trappes pour lâcher prise et tenter de les rejoindre au ciel.
Abruptement des phares, des gyrophares.
Éclairage en pleine face dans la nuit noire.
On se tient tranquille un moment.
Ils pensent sûrement à ce qui se passe là tout près de leurs yeux mais ne tenteront pas d'en savoir plus.
Demi tour
Ils disparaissent
Retour léger à ce qui avait été suspendu
(Petite sensation déjà connue venant de l'enfance à la nuance près de ne pas se sentir en faute mais d'être dans ce qui est vrai).
On dormira très peu.
On gardera des réserves.
On marquera cette nuit d' une croix parce qu'elle le vaut bien.