Dis-moi que nous avons encore le temps de nous émouvoir. Dis-moi.

dis-moi qu’on ne survole pas tout d’un grand bruissement d’aile. Dis-moi.

dis-moi que tout ce qu’on ne dit pas, tout ce que l’on écrit dans un demi-souffle,

entre les notes ne va pas se dissoudre dans un drive,

mais s’écrira un jour à l’encre ou bien sera creusé dans la glaise.

Qu’il y aura une trace de ce qui se passe en nous. Dis-moi que rien n’est vain.

 

Je regarde dans la glace les coups bas de la vie au travers des gouttelettes de buée

je passe mon doigt et je suis l'ovale et les courbes

quelques gouttes traversent et effacent le trait

le reste va s'évaporer

 

Je regarde le paysage, il ondule comme une caresse

érosion qui polit et adoucit les formes

je les suis du plat de la main

dans les trouées montent des volutes blanches qui se perdent dans un ciel

présences manifestes

j'écarte         les           doigts

 

Je te regarde partir dans la brume

tu ne dis plus rien

tu ne te retourneras pas

et lentement je me désagrège

je redeviens poussière

 

On posera une pierre sur les cendres de chacune de nos vies

 

 

"Ici gît, nos derniers mots"